lundi 2 mars 2009

Les armes disparues d’Afghanistan

Un organisme réputé du congrès américain, le GAO (Government Accountability Office), l’équivalent de notre Cour des comptes, cautionne un bilan du matériel militaire perdu en Afghanistan. En 46 pages, ces experts ont dressé un déprimant bilan pour la Grande Amérique et ses alliés, des trois dernières années passées à combattre talibans, insurgés nationalistes et commandos d’Al-Qaïda.
Le GAO affirme avoir perdu la trace de 87 000 armes (M-16, mortiers, etc.) sur les 242 000 expédiées en Afghanistan par le Pentagone. Le rapport mentionne que 135 000 armes fournies par les pays de l’Otan à l’armée et à la police afghanes ont, elles aussi disparu. Et de souligner la « corruption » et la « laxisme » des dirigeants de Kaboul. L’explication est un peu courte, car il ne s’agit pas seulement d’arnaque ou de revente à bon prix aux talibans. Selon les auteurs de ce document, nombre de soldats afghans formés par les officiers de l’Otan choisissent de déserter à la fin de leur instruction. Avec l’intention de rejoindre les rangs des insurgés ou les seigneurs de guerre qui règnent sur le trafic d’opium dans certaines provinces, et qui participent, dans de nombreux cas, aux combats contre l’occupant.
Cette guerre qui a plus de sept ans d’âge, figurait bien au menu de la réunion, les 19 et 20 février des 26 ministres de la Défense de l’Alliance. A Cracovie, ce jour-là, une note confidentielle de l’Otan a été remise aux participants. Elle contenait des statistiques en rien réjouissant. Pour l’année 2008 : assassinats et enlèvements +50%, pertes alliés + 35%, civils afghans tués +46% etc. S’y ajoutait l’affirmation du caractère « précaire » du régime du président Karzai et du climat de « corruption » locale.
Vedette de ces réflexions guerrières, Robert Gates, patron du Pentagone, a décrit aux ministres l’escalade militaire à laquelle se livrent désormais les insurgés, et prédit une crise majeure avant l’élection présidentielle afghane, prévue en août. Chef des troupes engagées sur place, le général US McKierman en a rajouté et il a annoncé que « 2009 sera la pire des années pour ses soldats ». C’est dire si, après cette aimable description d’un avenir aussi radieux, la délégation américaine voulait convaincre ses alliés d’accomplir de nouveaux efforts militaires et financiers. Difficile de suivre Washington sur ce terrain. Obama prévoit d’engager davantage de troupes et de crédits en Afghanistan, et d’y dépenser 100 millions de dollars par jour. Ainsi il a promis à ses généraux de leur envoyer, avant l’été, 17 000 hommes en renfort et de porter bientôt à 60 000 les effectifs de leur corps expéditionnaire.
Malgré l’exemple fourni par les Américains, et leurs revendications alliés récurrentes, les ministres alliés présents à Cracovie n’ont guère montré d’enthousiasme. Les Britanniques se sont engagés à envoyer 2 500 soldats en renfort, ce qui portera le nombre des militaires de Sa Majesté à environ 10 000 hommes. Plus modestes, les Allemands en promettent 600 et les Italiens 500.

Cinq milliards évanouis

Ministre français de la Défense, Hervé Morin n’a pas fait un triomphe. « La France n’envisage pas d’augmenter son contingent à court terme » a-t-il déclaré. Peut-être que plus tard, Sarkozy acceptera de consentir un effort ?. L’état-major examine la possibilité, si le Président veut jouer les bons alliés, de dépêcher a Kaboul entre 100 et 800 nouveaux combattants. Quelques dizaines de membres de la DGSE iront sans doute former au métier des barbouzes afghans. On pourrait leur demander de rechercher, sinon les armes disparues, plusieurs milliards évanouis dans la nature.
En juillet 2008, lors d’une conférence internationale à Paris, les pays donateurs avaient décidé d’allouer 21 milliards de dollars d’aide à l’Afghanistan. Tout n’a pas été versé mais, sur les 14 milliards déjà partis vers Kaboul, un tiers s’est perdu en route selon la comptabilité de l’Otan, comme le rapporte un analyste des services français de renseignement.
A croire qu’un émule de Madoff fait des siennes là-bas.

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