lundi 29 octobre 2012

Passe ton BAC

De Marseille à Paris, et de flics à magistrats, l'avis est unanime : l'affaire de la BAC (Brigade Anticriminalité) nord ne fait que commencer. Si une demi-douzaine de policiers sont écroués, une trentaine d'autres sont soupçonnés de détournement de scellés, de racket, de vol de bijoux, d'argent et de produits stupéfiants. Certains d'entre eux auront même à répondre de corruption. Et peut-être d'homicide pour les mêmes et/ou d'autres encore. « Ce n'est pas impossible », reconnaissent plusieurs sources proches de l'enquête, qui ajoutent aussitôt : « Nous n'en sommes pas là ». Pas encore...
Mais l'IGPN (Inspection Général de la Police Nationale) va chercher à savoir si les ripoux n'auraient pas désigné à des bandes rivales certains dealers comme des informateurs de la police. Sur les 20 règlements de comptes entre trafiquants marseillais (20 morts en 2012), deux au moins intéressent les enquêteurs de l'IGPN. L'un a eu lieu cet été à Aix-en-Provence, l'autre au printemps dans les quartiers nord de la cité phocéenne. Le mode opératoire était identique : une rafale de kalachnikov. Une manière radicale et devenue courante d'éliminer les présumés bavards.

L'enquête l'a d'ores et déjà démontré : les policiers de la BAC nord sont impliqués dans l'essor de l'économie souterraine à Marseille, contre laquelle ils étaient sensés lutter. Des habitants d'une cité d'un quartier nord se sont adressés, au printemps dernier, auprès du préfet délégué à la sécurité, Alain Gardière. Ils avaient observé des allées et venues de voitures de police banalisées au bas des immeubles. Mais leurs occupants, plutôt que d'arrêter les trafiquants, venaient juste récupérer leur dîme. Le préfet Gardière a transmis l'information au responsable local de l'IGPN. Des micros ont alors été placés dans les véhicules d'intervention et dans les bureaux de la BAC nord. Très méfiants à l'égard du téléphone, les ripoux parlaient librement en voiture et au vestiaire. « Ces écoutes sont accablantes », assure Jacques Dallest, le procureur de la République.

Le 8 octobre, le ministre de l'intérieur, Manuel valls, a prié Gardère de lui rendre visite. Il tenait à savoir « qui était au courant, et jusqu'à quel niveau la hiérarchie policière est impliquée ». on peut le comprendre : il vient de recruter Pascal Lalle comme directeur central de la Sécurité publique. Il y a peu encore, le même Lalle dirigeait les BAC des Bouches-du-Rhône. « Lalle ne savait rien », assure un haut fonctionnaire en poste à Marseille. « les bacqueux n'étaient ni dirigés ni surveillés. Ni par lui, ni par un autre. Ils fonctionnaient en totale autonomie. » « Certains d'entre eux étaient en poste depuis plus de quinze ans et bloquaient toutes démarches ou propositions d'évolution de carrière. Comme s'ils étaient liés à la BAC nord par un bail commercial. Lorsqu'on leur suggérait d'aller voir ailleurs, ils répondaient qu'ils étaient la mémoire du service, aussi indispensable qu'irremplaçables. Et la hiérarchie s'écrasait ».
Et ce d'autant que la BAC nord savait donner le change. Lorsque la pression politico-médiatique était trop forte pour détourner l'attention, ils faisaient un joli coup de filet. Comme débusquer une miraculeuse planque de kalachnikovs. Lorsque la pression retombait, ils retournaient à leurs petites affaires.

Les ripoux se faisaient « autour de 1 000 euros par mois, estime un enquêteur. « Sur écoute, on n'a un mec qui, arrivant le matin au bureau, raconte s'être fait engueuler par sa femme : le congélateur familial était foutue. Les collègues lui disent : Ben tiens ! Tape 1 000 euros dans la caisse ». C'est aussi simple que ça.

dimanche 14 octobre 2012

Les rats Monsanto

De toute façon il n'a pas choisi les bons rats. Deux ans de travaux, mais en ne choisissant pas les bons cobayes. Ce professeur Séralini est décidément bien niais et peu compétant. D'ailleurs c'est un militant puisqu'il se revendique anti-OGM, donc il est partie pris. Alors que tous les autres, les pro-OGM, font preuve d'une impartialité qui les honore. Non seulement ce Séralini a choisi la mauvaise souche de rats, mais il n'en a pas assez pris : 200 rats, ça ne suffit pas pour faire de bonnes statistiques. En plus il prétend que son étude est une première et que jamais on n'avait testé aussi longtemps les effets d'un OGM sur les rats : ce n'est pas vrai. De toute façon, tranche un professeur australien (rf Les Echos 20/09), si cette étude est vraiment pertinente, « pourquoi les Américains ne tombent-ils pas comme des mouches ? ».

Comme on peut le voir, c'est un vrai tir de barrage qui a accueilli l'étude de Séralini, selon laquelle les rats nourris avec le maïs transgénique Monsanto NK 603 développent beaucoup plus de tumeurs que les autres et meurent de façon nettement plus précoce. Il est vrai qu'il l'a bien cherché, en lançant son étude scientifique avec une stratégie médiatique assurée par une agence de communication, exclusivité accordée au « Nouvel Obs » avec un titre à sensation « Oui, les OGM sont des poisons ! », documentaire sur France 5, film en salles, livre signé Séralini (chez Flammarion) et autre bouquin signé Corinne Lepage (chez Charles Léopold Mayer). Des questions se posent tout de même : est-ce ainsi que doit avancer la science ?, pourquoi M.Séralini s'est-il adressé à deux fondations privées, dont celle de Gérard Mulliez, le patron d'Auchan, pour décrocher les 3,2 millions qu'a coûté son étude ?, pourquoi ce genre de recherche n'est-il pas orchestré par des organismes d'Etat impartiaux et hors de toute influence ?

En lisant « Tous cobayes ! », le livre de Séralini, on a un début de réponse : parce que l'Etat n'est pas impartial, le ministre de la Recherche incite les directeurs de laboratoire à collaborer avec les industriels de façon à financer leurs activités. Etat et industriels marchent main dans la main, et s'associe pour écarter les gêneurs. Dernier exemple en date : la rude et longue bataille qu'a dû mener Irène Frachon contre experts et autorités en tout genre pour faire éclater le scandale du Mediator. Au long de sa carrière, Séralini en a vu des bâtons dans les roues, autorités de l'Inra et du CNRS qui se désolidarisent de ses études, crédits de recherche supprimés, violentes attaques publiques, notamment quand Marc Fellous, président de la Commission du génie biomoléculaire, l'a traité de « chercheur qui se prétend indépendant alors que ses études sont financées par Greenpeace », de « marchand de peur » dont « les déclarations médiatiques sont systématiquement contestées par la communauté scientifique ». (M.Fellous a été condamné pour diffamation).

Tout cela ne prouve pas que Séralini a raison. Son étude, comme bien d'autres avant elle, peut-être entachée d'erreurs, rectifiée, voire contredite par des recherches ultérieurs. Que la science avance à coups de controverses, c'est tout à fait normal. Mais cette affaire montre l'existence d'un climat détestable. Que des chercheurs qui se veulent à contre-courant en soient réduits à adopter des méthodes marketing pour se faire entendre, cela prouve, s'il en était besoin, que la recherche publique n'est pas toujours ce qu'elle prétend être : indépendante, au-dessus des jeux d'intérêts, guidée par le seul souci de la vérité. De plus en plus, elle penche du côté des lobbys industriels et néglige les simples citoyens...

Liens :

http://ogm.greenpeace.fr/nocivite-des-ogm-pour-la-sante-de-nouveaux-resultats-accablants