Faites vos
jeux... Rien ne va plus
Pendant dix ans,
l'Europe ne s'était pas aperçus que l'île était devenue une
“économie casino”.
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Ces propos, tenus en
privé par Martin Schulz, le président du parlement européen,
expose bien la foire bruxelloise de ces dernières semaines.
Qui est responsible de
ces dix jours decafouillage chypriote ?. Pour une fois, les
dirigeants des autres pays de la zone euro sont d'accord : c'est le
Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, tout nouveau patron de
l'Euro-groupe, qui réunit les ministres des Finances des 17 pays de
l'Union monétaire. Le 15 mars, M.Dijsselbloem a fait adopter à
grande vitesse le premier plan. En échange d'une aide de 7
milliards, le texte prévoyait une taxation de tous les dépôts
bancaires chypriotes au taux de 6,75% en deçà de 100 000 euros et
de 9,9% au-delà. Un plan que le président chypriote Nicos
Anastasiades, a fait semblant d'accepter, en sachant parfaitement que
son parlement le refuserait.
Du coup, lors des
négociations autour du second plan, Dijsselbloem a été mis à
l'écart. Les réunions ont été menées par la patronne du FMI,
Christine Lagarde, Herman Van Rompuy, le président du Conseil
européen, et Olli Rehn de la commission européenne. Une troïka
qui, une fois son plan accepté par Chypre, l'a fait avaliser en
pleine nuit, par les ministres de l'Euro-groupe. Sans doute blessé
d'avoir ainsi été poussé en touche, le ministre hollandais a tenu
à se mettre en avant dès le lendemain. Dans une interview au
“Financial Times”, il a affirmé que Chypre représentait “un
nouveau modèle” pour résoudre les crises bancaires en Europe.
Effet de causalité immédiat : les valeurs financiaires
s'effondraient alors que des bruits de couloirs sur une possible
dégradation de la note de l'Italie contribuaient à aggraver la
panique. Le ministre espagnol des Finances, Luis Guindos, s'y mettait
à son tour, en expliquant qu'en cas d'échec du plan chypriote il
pouvait y avoir “contagion” de la crise à d'autres pays de la
zone euro. Faire porter le chapeau à ce ministre “novice” pour
reprendre un qualificatif de Pierre Moscovici, présente un autre
avantage : passer sous silence les responsabilités de la Commission
européenne, de la BCE et de l'Euro-groupe dans le naufrage financier
de Chypre. Ce n'est pas en une semaine que l'île s'est transformée
en un paradis fiscal où sont réfugiés des capitaux mafieux.
Les européens, sous
l'impulsion des Allemands, ont en tout cas atteint un premier
objectif : ils ont rayé de la carte la place financière chypriote,
où les dépôts bancaires atteignaient huit fois le PIB de l'île.
Mais Chypre n'est pas seul en Europe. Comme le fait remarquer Hubert
Faustmann (Le Monde 26/03), professeur à l'université de Nicosie :
<< de nombreux autres pays ont un secteur bancaire hypertrophié
et fiscalement avantageux, comme l'Irlande, Malte, les Pays-Bas ou le
Luxembourg, dont les banques possèdent vingt fois le PIB >>.
mais il y a une différence importante : pendant près de quatorze
ans, l'Euro-groupe a été présidé par Jean-Claude Juncker, le
Premier ministre du Luxembourg. La morale financière était donc
hautement garantie, et personne n'a encore eu l'idée de taxer les
dépôts bancaires du Grand-Duché.
Les
oligarques russes défendent leur machine à laver
Dans leur folie
taxatrice, les autorités européenne ont notamment épargné deux
banques bien particulières.
La première, Hellenic
Bank, troisième banque de l'île, appartient à l'Eglise orthodoxe
chypriote. Cette sainte institution est aussi le principale
actionnaire du premier producteur de bière. La seconde, VTB, est une
banque russe, semi-publique, qui gère les fonds des nombreuses
sociétés proches du Kremlin. En s'installant à Nicosie, celles-ci
ont pu bénéficier d'une fiscalité agréable et d'un laxisme
important sur l'origine de leurs liquidités.
Le président Poutine et
son premier ministre Medvedev, après avoir exprimé leur colère au
lendemain de l'annonce du premier plan, ont depuis mis de l'eau dans
leur vodka. Dès lundi matin, une fois connus les détails du second
plan, la Russie a fait savoir qu'elle était prête à assouplir les
conditions du prêt de 2,5 milliards d'euros qu'elle a accordé, il y
a deux ans à Chypre. Tout en accompagnant cette déclaration du
souhait de rapatrier ses capitaux baladeurs du côté de la Moskova.
Ce qui n'est problablement pas demain la veille. Car malgré le
sévère plan de rigeur imposé à l'île, Chypre restera un
sympathique paradis fiscal : le taux de l'impôt sur les sociétés
n'augmentera que de 2,5% pour atteindre 12,5%. En France, il s'élève
à près de 35%. preuve que l'Europe fiscale avance aussi vite que
l'Europe bancaire et monétaire.